Des témoignages d’anciens étudiants pour te permettre de te faire une idée sur l’avenir des étudiants de nos disciplines. Nous avons fait témoigner une étudiante, Sandra Forlini, qui a un profil dans le domaine de la géographie des transports.
Quel est ton parcours ?
J’ai un parcours peu tubulaire. J’ai eu un Bac ES spécialité économie parce que je voulais avoir un bon niveau général, mais je n’étais pas très attirée par les mathématiques. J’avais surtout peur de m’engager dans des études avec un volet scientifique. Partant de ce constat, et souhaitant continuer à étudier les disciplines littéraires, j’ai choisi de faire une hypokhâgne-khâgne. Je savais que je me réservais pleins de possibilités : journalisme, sciences po… j’étais plutôt forte en philosophie, en géographie et en lettres.
J’ai mis un peu de côté le volet « réflexion orientation » pour me concentrer sur améliorer ma méthode de travail, mon esprit critique, mes qualités littéraires. Un luxe. J’adorais le temps consacré à l’approfondissement des questions historiques, géographiques, théologiques, ontologiques… Je sentais que j’étais privilégiée qu’on attende de moi une réflexion poussée et une présentation soignée. J’avais peur de « l’après khâgne », avec tout le mal que j’entendais de l’université. Et puis j’étais impressionnée par la diversité des formations proposées, des possibilités. Je ne savais pas sur quel pied danser. Comment choisir ? Comment savoir ce qui va me plaire ?
Puis vint le choix de la licence. Pour illustrer mes idées, j’ai eu envie de savoir mobiliser des données, des outils, d’avoir des chiffres. Ca peut paraitre abstrait comme choix d’orientation, mais j’ai toujours voulu maintenir un équilibre entre mes compétences littéraires et scientifiques. J’ai réalisé que l’un m’ennuyait sans l’autre. Parallèlement, j’ai découvert la géographie universitaire, qui m’a passionnée. La diversité des métiers du territoire (urbaniste, géomaticien etc.) m’offrait tous les choix. Et comme j’aime ouvrir le champ de possibles, j’ai choisi une L3 de géographie. L’aménagement-urbanisme me semblait recruter, et être la traduction opérationnelle d’une analyse spatiale. Alors j’ai choisi ce Master à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
J’ai adoré réaliser un diagnostic territorial (traitement de statistiques INSEE, analyses paysagères, enquêtes de terrain, cartes…). J’ai beaucoup aimé mes stages aussi, dont un comme « chargée d’études – consultante junior » sur l’urbanisme et le transport en commun à Tahiti. Mais ce que j’ai préféré, c’était la liberté totale accordée pour mes mémoires de recherche. C’était terriblement difficile mais exaltant. On me laissait construire mes propres outils, fouiller les archives municipales, faire des études photos diachroniques, étudier des environnements sonores, réfléchir sur l’utopie urbaine… Mes sujets de recherche étaient un peu kamikazes car inexplorés, mais la rigueur et l’audace ont fini par payer ! Quelles études autres que la géographie nous permettent de tout étudier du moment qu’on spatialise notre analyse ? Toutes les combinaisons sont possibles, le monde est à notre portée. Je n’oublierai jamais le regard envieux des juristes et des économistes, quand ils découvraient combien nos enseignements étaient passionnants et laissaient une large place à l’actualité, à l’esprit critique et à l’analyse scientifique.
Pour finir j’ai fait un Master 2 Urbanisme et Aménagement spécialité Transport et Mobilité (Actuelle Ecole de l’Urbanisme de Paris et Ecole Nationale des Ponts et Chaussées). Dans la promotions, on était mélangés : sociologues, ingénieurs, logisticiens, historiens, architectes, urbanistes, géographes, économistes… Il devait y avoir une quinzaine de nationalités représentées. C’était la meilleure année universitaire, les cours étaient de grande qualité, on est même partis à Istanbul étudier leurs projets urbains & transports. Technique, cette formation alliait étude du transport en commun et du fret. C’étaient des conditions d’études géniales.
As-tu fais quelque chose à tes études ? Et si oui, es-tu parvenu à concilier les deux ?
Pendant mes études, j’ai travaillé (jobs étudiants divers) pour ne pas arriver avec un CV vide une fois diplômée. J’ai aussi été présidente d’association. C’est par l’associatif étudiant que j’ai donné du sens à mes études, appris comment bien travailler en groupe (c’est toute une science), et que j’ai fait les rencontre clés qui m’ont inspirée. L’associatif prépare très bien au monde professionnel. Grâce à l’asso, j’ai eu aussi eu la chance de vivre une vie étudiante hors norme, passionnante et mouvementée. J’ai visité toutes les grandes villes de France, ou plutôt leurs campus ! J’ai rencontré des gens très différents, des visionnaires, appris à travailler dur, et à mener à bien des projets qui nous semblaient parfois trop ambitieux au départ.
Que retiens-tu de tes années d’études ?
Ces années d’études m’ont fait apprendre par tâtonnements ce qui me plaisait. J’aime le travail d’analyse, ce qui est diversifié, le défi, et apprendre tous les jours. Et puis, étant une pile électrique, je me destine a priori à entreprendre, à faire du développement territorial dans une démarche de protection environnementale. Il y a pleins de choses à faire.
Où en es-tu maintenant ?
Je travaille depuis deux mois, et pour l’instant je suis en CDI en tant que responsable logistique et transport dans une des plus grosses entreprises de Polynésie française en pleine restructuration. Je manage 20 personnes, et je m’occupe de réseaux terrestres, aériens et maritimes. J’ai trouvé ce poste par une amie qui enseigne en BTS transport et qui visitait ses stagiaires, donc en sollicitant mon réseau. J’ai signé mon contrat au terme un mois de recherches, après un déménagement et des vacances bien méritées à Tahiti. Je me donne un an pour apprendre mon métier le mieux possible, ensuite… je consacre mes soirées à monter mon entreprise.
Pour l’anecdote, je suis déjà tutrice d’une étudiante en BTS, et jury expert du BTS transport cette année. Ca va très vite.
Que conseillerais-tu aux étudiants ?
Ce que je conseillerai aux étudiants ? Arrêtez un peu d’être raisonnables et d’écouter quand on vous dit que telle carrière est impossible. Ne soyez pas scolaires et désireux d’intégrer les formations les plus sélectives. Plus, c’est pas mieux. Et puis soyez un peu fous, on a besoin de gens inspirés qui font preuve d’audace. Osez, candidatez, postulez, vendez-vous, amusez-vous et faites-le bien ! Et surtout, ne vous autodisqualifiez jamais.
Ecoutez vos aspirations, voyez où vous voulez vivre (attention, un métier « trop » pointu c’est parfois vivre dans les très grandes villes et « pas assez », c’est délicat pour trouver un premier emploi de cadre…). Anticipez l’avenir, vos projets personnels. Pour ma part, j’ai fait le choix d’un domaine où je suis persuadée de toujours pouvoir trouver/créer du travail partout, la flexibilité, la liberté, c’est un peu mon moteur.