Retour sur la semaine sur les visions et droits des femmes en Europe
La première semaine de mars est une semaine dédiée à la promotion des droits et de l’égalité. A cette occasion l’AFNEG a abordé à travers plusieurs affiches les visions et discriminations envers les femmes. Nous nous sommes notamment intéressés à plusieurs pays européens via des affiches historiques. De 1917 à 1953 nos affiches mettent en évidence plusieurs thématiques tels que le droit de vote ou la maternité. Selon les années et les pays, les visions, les discriminations et les droits des femmes varient. Plus d’un demi-siècle plus tard, que reste-t-il de ces clichés ?
De nombreuses publicités véhiculent pourtant encore des clichés ou préjugés profondément sexistes. C’est par exemple le cas d’une publicité BIC. La marque française publiait en 2015 une publicité lors la journée internationale pour les droits des femmes. On peut y voir une femme en tenue professionnelle à côté du message : « look like a girl, act like a lady, think like a man, work like a boss ». Autrement dit : « ressemble à une fille, agit comme une dame, pense comme un homme, travaille comme un chef ». Pourquoi, en 2015, les femmes devraient-elles penser comme des hommes ?
Cet article retrace en partie l’histoire des droits des femmes européennes et questionne l’actualité de ce sujet majeur.
Genèse d’un mouvement politique
1945 : C’est l’année où les femmes votent en France pour la première fois lors d’élections municipales. 39 ans plus tôt les finlandaises pouvaient se rendre à l’isoloir. Ces droits obtenus sont le fruit de long processus de débats et de luttes. Deux ans après la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, Olympe de Gouges, écrivaine et femme politique, rédige un texte juridique : La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Depuis 1689 et le Bill of rights anglais, des hommes discutent des droits humains.
Si les Lumières apportent, progressivement, un progrès politique sans précédent sur le continent européen, les femmes s’en trouvent encore évincées. La convention écartera le texte proposé par Olympe de Gouges. En 1792 Mary Wollstonecraft s’interroge aussi sur les droits des femmes et évoque le rôle social qui lui est attribué. La femme est reléguée à son rôle de mère et d’épouse. L’homme a la charge du foyer et c’est à lui qu’incombent toutes les décisions le concernant. C’est sous ce prisme que les femmes obtiennent progressivement, et avec difficulté, leur droit de cité.
Une courte histoire du militantisme féministe
Dès la fin du 19e siècle des femmes et des hommes, militant.e.s et mouvements politiques commencent à s’organiser pour que l’égalité soit reconnue. Sans avoir la prétention à l’exhaustivité il est important de citer quelques noms parmi ces derniers. Les suffragettes sont peut-être les plus emblématiques. Les premières à être désignée sous ce nom sont les anglaises de l’Union sociale et politique des femmes (Women’s Social and Political Union ou WSPU). La plus connue de ses membres en est la fondatrice Emmeline Pankhurst. Ce mouvement représente aussi en tournant puisqu’en 1910 elles décident d’adopter des méthodes de protestations plus radicales.
Crachats, placement de bombes dans des magasins et bâtiment, tentative d’intrusion à Buckingham Palace sont autant d’actions choisies par les militantes. Leurs violences suscitent parfois l’indignation de la population, mais elles arrivent à s’accorder le soutien de l’opinion lorsqu’elles font face à la répression. Cette occupation de l’espace physique et médiatique, parfois violent, leur permet de se faire entendre. Lorsque la guerre est déclarée, en 1914, les suffragettes donnent priorité à l’effort de guerre. Leur mouvement sera dissout en 1917. Le droit de vote est progressivement obtenu en Angleterre de 1918 à 1928.
En 1907, Clara Zetkin devient la première présidente de l’Internationale socialiste des femmes. Elle est aussi la rédactrice en chef du journal Die Gleichheit (l’égalité). C’est à ce mouvement que l’on doit la journée des droits des femmes du 8 mars.
Ces femmes moteurs dans l’Histoire
En devenant commissaire au peuple à l’assistance publique de l’URSS, Alexandra Kollontaï, devient la première femme de l’histoire contemporaine à faire parti d’un gouvernement. Elle continue de s’exprimer pour une plus grande intégration politique des femmes dans les années suivant 1917 et met en lumière ce que l’on peut considérer comme étant une égalité parfois de façade dans le territoire soviétique.
Que ce soit sous le nazisme, le stalinisme, le fascisme ou encore le franquisme l’entre-deux-guerres puis la deuxième guerre mondiale marque un tournant pour les femmes. Elles sont tantôt instrumentalisées par les régimes politiques qui composent cette période et elles se retrouvent souvent à égalité avec les hommes dans la résistance.
Un deuxième et troisième temps amenant à des mobilisations actives
Dans les années soixantes on redécouvre Le deuxième sexe que Simone de Beauvoir avait écrit en 1949. La deuxième vague souffle sur la braise du féminisme dès les années 1960, d’abord dans le monde anglo-saxon, puis dans le reste de l’Europe occidentale. Cette dans ce contexte que l’avortement est autorisé en France en 1975.
La troisième vague du féminisme naît d’abord aux Etats-Unis dans les années 1980 et se diffuse ensuite en Europe occidentale. Un nombre important de femmes ont été mises de côtés durant les précédents combats. Les femmes des classes les plus populaires ont toujours travaillées, dans des conditions parfois encore plus difficiles que les hommes (pour lesquels les conditions étaient aussi extrême). Le rôle social de mère qui lui est attribué est pourtant pendant longtemps le même.
Droits des femmes : une histoire finie ?
Cette histoire du droits des femmes est aussi riche qu’elle est dans l’ombre. Si certains semblent penser le contraire, l’égalité n’est toujours pas acquise. L’espace public et privé continue de se vivre de manière différenciée, que l’on soit femme ou homme. Quand elles ont trois enfants 55 % des femmes prennent tout de même le chemin du travail tous les matins, contre 83 % des hommes. Parmi toutes les femmes qui travaillent, 31, 9 % le font à temps partiel. 8,8 % des hommes travaillent à temps partiel.
En Europe l’écart de salaire varie de 3,5 % (Roumanie) à 25, 6 % (Estonie). Ces pourcentages représentent la part en moins de salaire que les femmes obtiennent. La France se situe presque dans la moyenne européenne (16 %) avec ses 15,4 %.
Les écarts législatifs mais également le rapport culturel à la parentalité font qu’aujourd’hui, les homme faisant le choix de prendre un congé parental (à ne pas confondre avec le congé maternel ou paternel), leur permettant selon le droit de l’Union Européenne de passer au minimum quatre mois avec leur enfant sans travailleur sont toujours très peu nombreux par rapport aux femmes. Ils représentent 1,1 % en Pologne jusqu’à 45,3 % en Suède. En France, en 2016, ce sont 4,4 % des hommes qui ont bénéficiés de ce congé.
La législation est très différente d’un pays à l’autre. En Suède ou au Portugal, la prise paritaire de ce congé permet au couple de bénéficier de primes. En France l’indemnité pour le congé parentale est de 396 euros par mois. Mais le modèle familial (La femme s’occupe des enfants !) ainsi que le fonctionnement du marché du travail sont aussi largement à remettre en question.
“Le sexe faible”
Le corps de la femme est une carte incomplète. Les hommes et les femmes ne le connaissent pas si bien. Il est bien souvent instrumentalisé. Gynécologue et Obstétricienne Odile Buisson parle, par exemple, “d’excision mentale” quand elle évoque la connaissance du clitoris. L’euphémisation voire la méconnaissance totale du corps féminin empêche parfois la reconnaissance médicale de maladies. L’endométriose, le vaginisme… tant de noms laissés à l’abandon parce “sales”, “pas importants”.
Dans le premier cas (décrit pour la premier fois en 1860) ce sont pourtant entre 10 % et 20 % des femmes qui seraient concernées. Plus que médicaux ce sont bien des sujets de société qui devraient nous pousser à, enfin, allumer la lumière. Le fait qu’un secrétaire d’Etat français (Christian Eckert) puisse, en 2015, comparer la mousse à raser aux produits hygiéniques de première nécessité montre à quel point nous manquons à la fois de sérieux et de lucidité face à des enjeux de santé et d’égalité.
Le harcèlement sexuel, un sujet d’aujourd’hui
Avec 76 % de femmes qui en auraient été victime en Europe le harcèlement sexuel constitue encore un frein au droit des femmes à vivre de la même manière l’espace que les hommes. Nos université et nos associations étudiantes ne sont pas exempts de tout reproche. C’est contre ce phénomène que l’association Clasches entend lutter. Pour plus d’information nous vous invitons à consulter le lien disponible plus bas.
Conclusion
De la législation à la rue, en passant par nos espaces privés la femme est encore loin d’être mise sur un pied d’égalité avec les hommes. Il nous incombe en tant qu’étudiant.e.s engagé.e.s, association ou simple citoyen.ne.s de sensibiliser sans relâche.
Petite bibliographie non exhaustive :
Magazine Femme ici et ailleurs. Les éditions du 8 mars. Bimensuel.
Brenot P., Coryn L. Une histoire du sexe. Les Arènes éditions ; 2017
Emma. Un autre regard. Florent Massot éditions ; 2017
Le Gac J., Virgili F. L’Europe des femmes XVIIIè-XIXè siècles. Perrin ; 2017
Piquard JC. La fabuleuse histoire du clitoris. Broché ; 2013
Virgili F. Les lois genrées de la guerre. Belin ; 2014.
Liens utiles :
Inégalités Femmes-Hommes en France
Le Clasches, collectif de lutte contre le harcèlement sexuel dans l’enseignement supérieur